Cartomancie et divination : honorer le présent et accueillir le futur de la pratique
Tous·tes les cartomancien·nes ne lisent pas les cartes de la même manière et la vision qu’iels ont des cartes et de la démarche divinatoire est différente. Le chemin qu’emprunte leur intuition est distinct et contrasté.
Lorsqu’il s’agit de progrès en sorcellerie, la longévité est ce qui compte,
car le pouvoir et l’éveil nous viennent lentement, construits sur une expérience étalée au fil des années.
Roger J. Horne
Un.e cartomancien·ne adéquat·e saura émettre des messages clairs, des axes et des propos nuancés, ainsi que formuler plusieurs hypothèses tout en précisant ce que les cartes profèrent. Pour être un·e bon·ne cartomancien·ne, il faut « vivre » ; l’identité de la cartomancien·ne ne peut se déployer qu’à force d’expériences, d’essais et d’erreurs, de vécu. Tout part d’abord de la personne qui lit les cartes, avant les cartes elles-mêmes. C’est sa voix unique et son intuition aiguisée qui enrichiront les séances et étofferont son art.
Ma vision de la cartomancie (avec les cartes à jouer ou usuelles) se dissocie parfois de ce qui est considéré comme « la norme ». Par exemple : l’ordre des suites (cœur, trèfle, carreau, pique) ou des éléments auxquels on associe les cartes sont disparates et l’intuition détermine des procédures et lectures que j’en fais. J’accorde une importance particulière à chacune des suites et des lames, je pose un regard singulier sur ce qu’elles représentent ; comme artiste divinatoire* je ne souhaite pas reproduire, mais désire sortir des sentiers battus et laisser ma vision de la cartomancie s’exprimer librement.
Les méthodes divinatoires sont souvent basées sur des transmissions orales (ce qui est mon cas, étant cartomancienne de troisième génération), des écrits datés de plusieurs décennies, voire des centaines d’années. Elles sont généralement fondées sur des concepts, des fantasmes ou sur l’imagination de pratiquant·es et de prédécesseur·es. Les barèmes enseignés ou imposés sont, à mon avis, des suggestions et non pas des vérités ultimes.
Je suis émerveillée par les possibilités offertes par la cartomancie avec un jeu de cartes ordinaire, fascinée par ses perspectives diverses. Nous pouvons nous libérer des dogmes prescrits à travers cet art, mais je m’aperçois qu’encore, l’idée de se dépouiller des cadres est difficile ou inconfortable. Pourquoi ne pas recourir aux bases déjà érigées afin d’y construire des fondations authentiques et actuelles ? La santé et la longévité d’un mouvement, d’un art, sont assurées par la volonté de transmission, de réinvention et par la qualité des nouvelles interprétations livrées par les générations suivantes.
La gnose (l’expérience et les révélations personnelles), me donne beaucoup plus espoir en la pratique, et en celleux qui l’appliquent à leur technique ; parce qu’iels ne remâchent pas sans cesse les mêmes définitions et leur lecture des cartes est unique. Une intuition solide et un langage clair m’impressionnent davantage que la répétition des significations attribuées et maintes fois vues.
Choisir d’étudier son art, de développer ses aptitudes, pour ensuite livrer des messages éclairés par sa propre lumière — et avec confiance — démontrent un grand respect envers le système de la cartomancie ou de tout autre art divinatoire. Il ne s’agit pas de rejeter « l’avant », mais plutôt d’honorer ce qu’il est et d’expérimenter « le maintenant » pour mieux accueillir « l’après ». C’est faire de ces approches une activité accessible et pérenne.
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*Nous sommes tous·tes créatif·ves et artistes de notre vie, il n’est pas présomptueux de nous percevoir comme tels — puisque nous nommons — très souvent — « art divinatoire » pour décrire ces pratiques.
Référence :
Traduction libre, On self and image, Roger J. Horne, https://rogerjhorne.com/2022/06/21/on-self-and-image/